Dans une économie linéaire, le bois est récolté en forêt, transformé en planches ou en panneaux, puis assemblé par exemple en armoire, pour un beau jour terminer à l’enfouissement. Cette économie linéaire contribue à la production de déchets, sans se soucier de la consommation en ressources naturelles et des répercussions néfastes sur l’environnement.
Pourtant, le bois est un matériau renouvelable de choix pour réduire au minimum l’empreinte environnementale des produits, et refermer la boucle de cette économie contre-productive. Voyons comment le bois permet une circularisation d’une partie de l’économie québécoise.

On devrait d’ailleurs parler d’économie multicirculaire, car en suivant le principe de la hiérarchie des 3RV-E, il est possible de former plusieurs boucles, comme le montrent de nombreux acteurs de l’industrie forestière.
Le premier R est celui de la réduction à la source qui consiste à optimiser la ressource en réduisant la quantité de bois utilisée et les déchets. Par exemple, les têtes d’épinettes sont trop petites pour en faire des 2 x 4, mais Chantiers Chibougamau en tire profit pour fabriquer des poutres de bois lamellé-collé. La préfabrication en usine de fermes de toit et même de pans de murs ou de toitures permet aussi d’optimiser la ressource et de réduire les retailles. Quant aux résidus de sciage, ils sont récupérés pour la fabrication de pâtes et papiers et de panneaux de particules. Damabois, qui fabrique des palettes, utilise ses propres résidus de sciage pour les presser et en faire des palettes de bois pressé.
Le deuxième R est celui du réemploi, largement mis en œuvre dans le marché du meuble usagé, que ce soit chez les antiquaires, dans des magasins spécialisés, des marchés aux puces ou par l’entremise de sites de petites annonces.
Le troisième R est celui du recyclage et il en existe plusieurs niveaux, à commencer par la réparation. Les meubles en bois se réparent bien sûr, mais Alséro récupère aussi les palettes usagées pour les remettre à neuf. Le recyclage, c’est aussi récupérer le bois pour en faire de nouveaux produits différents. Vieux Bois et Écobois récupèrent ainsi du bois des chantiers de démolition et le transforment en bancs, poutres, revêtements, etc. Enfin, le bois usagé peut être déchiqueté dans des centres de tri spécialisé comme le Groupe Bellemare pour rejoindre l’industrie des panneaux de bois comme Tafisa et MSL pour la fabrication de mobiliers de cuisine ou d’isolants. De son côté, Cascades ou encore Kruger recyclent les papiers et les cartons pour en faire des papiers et des cartons recyclés.
Le V est pour valorisation. Il s’agit d’utiliser un résidu et de le réinsérer dans un processus industriel pour en sortir un produit différent du premier. C’est le cas de l’isolant thermique Sopra-Cellulose fait à 85 % de papier recyclé. La valorisation peut aussi être énergétique quand les résidus de bois sont brûlés pour alimenter un système de chauffage. De nombreuses entreprises, comme Charpentes Montmorency ou Planchers PG, utilisent leurs propres résidus pour chauffer leur usine ou fournir de la chaleur à leur procédé de fabrication. D’autres, comme Lauzon Bois énergétique recyclé produit des granules à partir des résidus produits par la maison mère Lauzon Plancher de bois exclusif.
L’exemple des stratégies du secteur forestier au service de l’économie circulaire permet de remplacer le E, celui de l’élimination, par le E de l’écoconception qui devrait se placer en amont de la hiérarchie des 3 RV. Dans son sens le plus large, l’écoconception d’un produit consiste à privilégier des matériaux à faible empreinte environnementale, à optimiser l’usage de ces matériaux, mais aussi à assurer la démontabilité du produit pour en recycler les composantes. C’est l’approche de l’entreprise Linéaire Écoconstruction, qui récupère et réutilise des matériaux de construction, mais qui assemble aussi ses charpentes à l’aide d’anciennes techniques de tenon et de mortaise pour en faciliter le démantèlement. C’est un bel exemple d’une entreprise qui applique les principes d’économie circulaire sur toute la durée de vie de ses produits.
De nombreux acteurs de l’industrie forestière trouvent leur place dans la logique de l’économie circulaire, et elle peut contribuer à améliorer l’économie circulaire du secteur de la construction qui envoie annuellement plus d’un million de tonnes de résidus, dont du bois, à l’enfouissement. Quand on dit que le secteur forestier peut faire la différence sur le plan environnemental, c’est l’une des possibilités!